mercredi 30 septembre 2009

Le Bulletin célinien n°312

Sortie du Bulletin célinien n° 312, octobre 2009.

Au sommaire :
* Marc Laudelout : Bloc-notes
* Emmanuel Caloyanni : Ralph Soupault et Céline
* Serge Joncour & Camille Laurens : "Voyage" sur l'île déserte
* Omar Merzoug : Hommage à Philippe Bonnefis
* Alexandre Junod : Du "Voyage au bout de la nuit" à "End of the night"
* Roger Nimier : "Nord" de L.-F. Céline (1960)
* Michel Bergouignan : L.-F. Céline, contradictoire et passionné (I)


Un numéro de 24 pages, illustrations. Disponible contre un chèque de 6 € franco à l'ordre de M. Laudelout.

Le Bulletin célinien
B. P. 70

B 1000 Bruxelles 22

Céline à Fontainebleau - Théâtre des Sablons - 4 et 5 décembre 2009

lundi 21 septembre 2009

Louis-Ferdinand Céline dans la Pléiade

Le volume de la Pléiade consacré à la correspondance de Louis-Ferdinand Céline sortira le 13 novembre 2009.



Les dessous de la Pléiade, extrait de l'émission "Stupéfiant" du 23 janvier 2017 :



Le Petit Célinien n°19

Le Petit Célinien n°19:

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Le Petit Célinien n°19 - Semaine du 21 septembre 2009.

Au sommaire:
- Céline à Londres (II)
- Les médailles militaires de LF Céline
- Léon Poliakov et le procès Céline
- "Dieu qu'ils étaient lourds" (Entretien avec A. Zbinden, 1957, extrait)
- Lectures

samedi 19 septembre 2009

Léon POLIAKOV et le procès CÉLINE

Février 1950. La Cour de Justice de Paris s’apprête à juger Céline, alors exilé au Danemark. C’est le moment que choisit Léon Poliakov (1910-1997) pour signer dans Le Monde juif un article très sévère, « Le cas Louis-Ferdinand Céline et le cas Xavier Vallat » (qui, lui, avait déjà été jugé et condamné en 1947).

Cet article a été reproduit dans un recueil intitulé Sur les traces du crime ¹.
Deux éléments suscitèrent, de toute évidence, l’indignation de l’auteur. La première est la publication dans Combat (19 janvier 1950) de la préface de Milton Hindus à la traduction américaine de Mort à crédit, sous le titre (choisi par la rédaction) « Un Juif témoigne pour L.-F. Céline ». La seconde est la libération conditionnelle de Xavier Vallat qui avait alors été tout récemment accordée.
Poliakov avait-il vraiment lu les satires que Céline publia avant guerre ? On peut en douter puisqu’à la veille de ce procès, il ne craint pas d’écrire ceci : « À l’époque de l’apaisement et de Munich, Céline avait déversé des torrents de haine démente sur les Juifs dans des pamphlets dont les titres déjà (Bagatelles pour un massacre, L’École des cadavres), dans leur crescendo forcené, sollicitaient et préfiguraient à la fois le déroulement progressif de l’œuvre exterminatrice. »
Un demi-siècle après ce procès (où Céline fut déclaré en état d’indignité nationale), il ne s’agit évidemment pas de prendre la défense de l’écrivain mais de rétablir les faits, et de rappeler que ces affirmations sont dénuées de tout fondement. À celles-ci, on peut aujourd’hui en opposer d’autres, notamment celles de chercheurs peu suspects de complaisance envers Céline : « Pour la plupart des lecteurs de l’époque, comme pour ceux d’aujourd’hui, Bagatelles pour un massacre, est un appel au pogrom, à tuer des juifs. Or, une lecture même cursive de ces textes montre à l’évidence qu’il ne s’agit pas de cela ; le massacre en question est celui des Français dans la guerre à venir : conflit en vue duquel ces mêmes Français, futurs cadavres, sont endoctrinés, formatés, éduqués – bien entendu par les juifs, les francs-maçons, les politiciens, etc. » (Régis Tettamanzi, Esthétique de l’outrance. Idéologie et stylistique dans les pamphlets de L.-F. Céline, vol. 1, Éd. du Lérot, 1999, p. 26).

Le fait que le texte de Combat fût écrit par un coreligionnaire eut également pour effet de susciter le courroux de Léon Poliakov. Les expressions qu’il utilise pour le désigner (« auteur juif américain », « intellectuel juif »,…) montrent assez que les origines de l’auteur (de cette défense littéraire) constitue pour lui une circonstance aggravante. Pratiquant la technique de l’amalgame, Poliakov n’hésite pas à comparer Céline à… Julius Streicher ( !) — Nietzsche, Rosenberg, Bardèche, Amaudruz… sont également cités dans la foulée.
Tel quel, ce texte constitue un document intéressant qui n’est pas sans rappeler certaines analyses réductrices dont Céline fait toujours l’objet aujourd’hui.

Marc LAUDELOUT

1. Léon POLIAKOV, Sur les traces du crime, Berg International, 2003, 232 p.

Ce texte a paru initialement en novembre 2003 dans Le Bulletin célinien.

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mercredi 16 septembre 2009

Le cri de Céline par Jean Lasserre - La Gerbe - 27 avril 1944

A l'instant des grandes catastrophes, à la veille des grands ravages ou des prodiges, alors que le peuple s'abandonne aux pressentiments de l'angoisse, se livre au désordre et bat comme une marée d'équinoxe les murs des prisons ou des cathédrales, des casernes, des mauvais lieux et des banques, des hommes soudains surgissent. Que va-t-il se passer? Ils ont jailli de la foule, de son flux et de son reflux, ils se dressent sur une borne, à un carrefour, dans l'obscurité terrifiée d'un moyen-âge, prédicateurs ou prophètes, martyrs parfois, et ils parlent.

Ils ne pourraient pas ne pas parler; ils expriment le sens de la rumeur fiévreuse, et incompréhensible jusque-là, qui monte de cette foule; une lucidité dévoratrice les anime, ils ne sont plus que le trou noir d'une bouche où retentit le plain-chant d'une vérité atroce et stricte.

Il fallait que ce qu'ils disent fût dit, et il fallait qu'ils fussent là pour le dire, sinon l'ordre des choses, même révolutionnaire ou bouleversé, sinon cet ordre ne serait ni complet ni juste. On croirait que le destin les a fait paraître pour que le peuple au milieu duquel ils se révèlent fût averti du péril, pour que lui fût offerte la dernière chance d'entendre la plaidoirie de sa sauvegarde, pour qu'on ne pût reprocher à la fatalité de s'être montrée féroce à son endroit, de l'avoir traité en ilote. On lui a donné une occasion d'avoir, peut-être, le dernier mot, et ces hommes l'en préviennent.

A tous les tournants de l'Histoire, nous les rencontrons, plus ou moins forts, plus ou moins habiles, parfois écoutés et compris, souvent méconnus; leur cri a toujours le même accent d'alerte.

Dans notre temps, M. Louis-Ferdinand Céline aura été ce cri.

Il fut ce cri dès son premier ouvrage. On peut penser que dès le Voyage au bout de la nuit c'était commettre une erreur que cantonner Céline dans la littérature, comme, plus tard, de l'annexer à la politique. Il était Céline, et Céline demeure un fait, non point un problème.

Quelle critique littéraire pourrait, en effet, revendiquer comme écrivain de son ressort un homme qui échappe aux lois de la grammaire? Ne nous occupons même pas de celles de la composition, mais de cette grammaire que le cher vieux Littré définit "l'art d'exprimer ses pensées par la parole ou l'écriture d'une manière conforme aux règles établies par le bon usage"... Quel souci pourrait donc en avoir Céline? Mais Céline est lui-même la preuve que la grammaire est touchée à mort!...

A la suite de ses autres ouvrages, on veut l'encadrer dans la politique. Mais il a dépassé depuis longtemps l'étape d'une époque où la politique est soumise elle-même aux grammaires des partis, chacun d'eux ayant bien la sienne, et moribonde. Céline ne relève d'aucune, d'aucun. Vouloir classer Céline dans une catégorie quelconque, c'est nier Céline. Il n'y a de problème Céline ou de "cas Céline" que pour ceux qui tenteraient de le ranger, sur les rayons de leur bibliothèque, parmi d'autres auteurs. A côté de Rabelais? Grand honneur, sans doute, mais, à part des apparences de verve, quels autres rapports? L'action de Céline est autre part et je crois qu'on ne peut lui donner sa place que dans l'ordre chronologique. Céline, en effet, restera comme une sorte de phénomène produit par les événement, comme la manifestation d'un temps. Que cette manifestation ait eu lieu par la prose et par l'édition n'est qu'un détail.

J'ai découvert Louis-Ferdinand Céline à Shanghai. C'était après que le prix Goncourt, qui lui paraissait destiné, eut été donné à un autre. Cela fit, paraît-il, un beau tumulte, mais en Chine les querelles du restaurant Drouant et du café des Deux-Magots avaient peu d'écho; aussi est-ce tout à fait par hasard que j'achetai, à la librairie française de l'avenue Joffre, le Voyage au bout de la nuit.

Rentré chez moi, et avant de sortir pour dîner, je commençai à feuilleter l'énorme bouquin. J'avais rendez-vous avec des amis, ils purent m'attendre longtemps! Une heure après avoir ouvert le Voyage, sans même pouvoir détacher mes yeux de la page que je lisais, je retirais ma cravate, puis, plus tard, ce fut au tour de mes souliers. Enfin l'aube survint, j'entendis les premiers appels des marchands ambulants, des mendiants, du barbier des rues, et je me découvris soudain gelé, affamé, mais à la dernière page du livre, et comme ivre.

Je ne crois pas qu'on puisse avoir d'une autre façon la révélation de Céline. Peu importe que ce soit à Shanghai, ou à Paris, ou n'importe où, mais, avec le recul du temps, terminant cette nuit-même son dernier ouvrage, Guignol's Band, je comprends pourquoi le coup qu'il nous portait, voici quinze ans, fut si rude et si magnifique, et c'est bien le mot de "révélation" qui convient.
- Des personnages comme ceux-là, disent à propos des héros de Céline les gens qui ne l'aiment pas, ça n'existe pas!
Mais si! Mais si, il existe, cet univers qui fait penser par instants aux Péchés Capitaux de Jérôme Bosch où des déments satisfaits d'eux-même et des idiotes lascives cavalcadent sur des chevaux obscènes. Il est là sous nos yeux, cet univers; nous n'avions pas su le voir et Céline nous découvre sans artifice que nous en faisons partie et que nous avons avec ceux qui s'y ébrouent une abominable fraternité.

C'est là, justement, qu'il échappe à la littérature comme à la politique. Il est un reflet. Plus tard, les historiens devront lire Céline non point pour y trouver une peinture exacte de l'époque, mais pour saisir quel fut son esprit, ce que fut sa détresse, cette détresse qui est intolérable à Céline, et qui le poursuit si fort qu'il ne peut s'en détacher et que nous retrouvons dans Guignol's Band - dont l'intrigue importe peu! - l'écho de sa furieuse pitié pour les hommes de son pays et de son temps.

"On serait né fils d'un riche planteur à Cuba Havane, par exemple, tout se serait passé bien gentiment; mais on est venu chez des gougnafes, dans un coin pourri sur toutes parts; alors il faut pâtir pour la caste et c'est l'injustice qui vous broie, la maladie de la mite baveuse qui fait vantarder les pauvres gens après leurs bévues, leurs cagneries, leurs tares pustulentes d'infernaux, que d'écouter, c'est à vomir tellement qu'ils sont bas et tenaces! Mois après mois, c'est sa nature, le paumé gratis il expie, sur le chevalet Pro Deo, sa naissance infâme, ligoté bien étroitement avec son livret matricule, son bulletin de vote, sa face d'enflure."

Je détache ces lignes de Guignol's Band paru aujourd'hui, en 1944, mais elles figureraient aussi bien dans le Voyage, dans Mort à Crédit ou dans Bagatelles pour un Massacre, publiés bien avant la consécration de notre misère. On y trouve la même âme généreuse et enragée que dans un autre ouvrage de Céline, beaucoup moins connu, qui fut, je crois, sa thèse en médecine, sur Semmelweis - Semmelweis, un des pionniers de l'antisepsie et qui mourut fou, ruiné, déshonoré pour avoir sauvé de la fièvre puerpérale des femmes en couches. Le style de Céline est, là, celui qui convient à une thèse de doctorat, mais la haine de la bêtise, de l'égoïsme, de la veulerie y éclate à chaque ligne. Cette haine, il l'éprouve, avec le même instinct, pour ce qui est conventionnel et creux, et cela se traduit, dans Guignol's Band, par un récit où le déchaînement verbal arrive, en certains passages - curieux paradoxe! - à une saisissante concision. Il y a quelques lignes pour nous décrire des quartiers pauvres de Londres et qui n'ont d'égales nulle part. Elles m'ont fait penser à cette petite prostituée famélique à laquelle Thomas de Quincey donna rendez-vous et qu'il ne retrouva jamais. Je la voyais, se croyant oubliée alors qu'on la cherche avec désespoir, et attendant vainement au coin d'une de ces uniformes rues de suie, de trottoirs sans fin et de brouillard. On entend, venant d'un pub voisin, l'écho du piano mécanique délabré où les arsouilles imaginés par Céline glissent des shillings gagnés par leurs femmes...

Mais alors? dira-t-on, en voilà bien, en voilà tout de même, de la littérature?

Non. C'est autre chose. Sans doute Guignol's Band peut bien être étiqueté "roman", puisque c'est une histoire qu'on nous raconte; mais, dans le Londres de ce roman comme partout où nous a promenés Céline, l'humanité la plus épouvantable éveille en nous, dans ses pires excès, de trop troublantes et trop précises résonances. Nous nous y reconnaissons dans des circonstances trop affreuses, redoutablement proches ou possibles.

Beaucoup de gens, convenons-en, n'apprécient pas ce genre de découvertes. Ils se croyaient généreux, beaux, intelligents, et Céline vient les convaincre qu'ils gisent au fond d'une bauge. Il n'y peut rien. Sans sa pitié et sa clairvoyance il serait sans doute un grand romancier; cependant, c'est plus fort que lui, il est Céline et Céline n'est pas l'homme des temps heureux.

Les temps heureux n'ont pas de Céline.

La Gerbe, du 27 Avril 1944.

lundi 14 septembre 2009

Le Petit Célinien n°18

Le Petit Célinien n°18:

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Le Petit Célinien n°18 - Semaine du 14 septembre 2009.

Au sommaire :
- Céline à Londres (I)
- "Expression célinienne" par F. Perronnet
- Céline et le hibou
- Le symbolisme du hibou
- Marc Stéphane, précurseur de LF Céline ?
- Petites annonces
- Lectures

jeudi 10 septembre 2009

Le gorille de Brassens inspiré par Céline ?

Un lecteur nous soumet l'hypothèse intéressante suivante :

Je viens d'écouter une interview de Georges Brassens du 19.03.67 par Michel Pollack ou le chanteur dit tout le bien qu'il pense de Celine et précise qu'il a lu de nombreuses fois notamment Voyage au bout de la nuit autour de ses 20 ans.
Je me demande si sa chanson de 1953 "gare au gorille" n'a pas été influencée par la phrase de Céline dans Voyage page 118 de l'édition folio : "
ça valait un viol par gorille" en parlant des femmes à bord du bateau lors de son voyage vers l'Afrique.
Je laisse cette idée à votre réflexion.


Laissez-nous vos commentaires, réflexions ou complément d'information en déposant un commentaire ou directement par courriel à l'adresse du Petit Célinien.

mercredi 9 septembre 2009

Louis-Ferdinand Céline par José Corréa - Tirage grand papier - 100 exemplaires

Céline, aucune illusion de José Corréa, recueil de 13 dessins inspiré de la vie et l'oeuvre de Louis-Ferdinand Céline. Un tirage Grand papier tiré à 100 exemplaires, signés et numéroté par José Correa, sur Vélin BFK Rives 270 gr. est désormais disponible :

www.alainbeaulet.com

mardi 8 septembre 2009

Décès de Louis-Albert ZBINDEN

20min.ch, 8/9/2009 : L'écrivain et journaliste neuchâtelois Louis-Albert Zbinden s'est éteint à Paris à l'âge de 86 ans. Après des études à Genève, il a travaillé à la Radio suisse romande (RSR) dès 1947. Ce dramaturge et poète a signé plusieurs romans ainsi que des nouvelles. Le décès a été annoncé par le «Quotidien jurassien» dans son édition de mardi. Se qualifiant de Jurassien neuchâtelois, Louis- Albert Zbinden fut correspondant à Paris de plusieurs organes de presse. 

Il a réalisé pour la RSR maintes émissions littéraires, en particulier avec l'écrivain Louis-Ferdinand Céline. Ses auditeurs appréciaient beaucoup ses chroniques «Le regard et la parole» diffusées de 1977 et 1986, le samedi matin. Il y commentait avec verve des faits d'actualité.

Il laisse une vingtaine d'ouvrages. Ce sont par exemple le recueil de poésie «Les yeux ouverts» paru en 1956, les romans «L'emposieu» (1981), «L'orgue de Barbarie» (1988) et «Le Pollen de Satan» (1992) ainsi que des nouvelles réunies sous le titre «Marie Casamance, suite jurassienne» en 1995. Atteint dans sa santé depuis quelques années, Louis-Albert Zbinden était très affecté depuis quelques mois par le décès de sa troisième épouse, indique le journal. Il sera enterré à Paris.



Notre vie est un voyage...

Notre vie est un voyage
Dans l'hiver et dans la Nuit,
Nous cherchons notre passage
Dans le Ciel où rien ne luit.

Chanson des Gardes suisses, 1793.
Cité par Céline en tête de Voyage au bout de la nuit.

lundi 7 septembre 2009

Le Petit Célinien n°17

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Le Petit Célinien n°17 - Semaine du 7 septembre 2009.

Au sommaire :
- Le cri de Céline (La Gerbe, 27/04/1944)
- Petites annonces
- Céline à Meudon
- Céline dans le texte
- De Céline à la météo
- Personnages céliniens : Henry de Graffigny
- Lectures

dimanche 6 septembre 2009

Qu’est-ce qu’un critique de droite ? par Pierre Assouline

Pol Vandromme, en voilà un. Qu’il soit belge et mort n’y change rien. Il n’y avait pas plus germanopratin et il est toujours très présent dans l’esprit de ceux qui l’ont connu. Il a fichu le camp il y a peu à 82 ans. Les gazettes ne l’ont guère signalé. Le Bulletin célinien répare cette lacune en lui consacrant sa dernière livraison (n° 311, septembre 2009). Un bouquet d’hommages de qualité dont il ressort en spadassin des lettres et en wallon équipé d’un parapluie quand il pleut à Paris. Ce passeur des Lettres approuvait son ami Dominique de Roux lorsque celui-ci divisait la gent critique littéraire en trois espèces : ceux qui ne savent pas lire, ceux qui ne savent pas écrire, ceux qui ne savent ni lire ni écrire. Ce qui était assez bien vu.

Critique, journaliste, essayiste, biographe, pamphlétaire, Pol Vandromme éprouvait une passion et un enthousiasme inépuisables pour la littérature française, à condition qu’elle fût une fête et qu’elle sacrifie au style. Pas toute, évidemment. Pas Malraux qu’il exécuta dans un essai prétendant l’encadrer dès le titre entre “le mirobolant et le farfelu”. Au-delà de la littérature ”classique classique” (Saint-Simon, Stendhal et compagnie), il rangeait dans son propre panthéon de la “classique moderne” toute une bande d’écrivains dont certains lui étaient familiers. Derrière leur vrai père à tous, Georges Bernanos, question de génération et de distance, de respect aussi peut-être, on trouvait André Fraigneau, Kléber Haedens, Roger Nimier, Michel Déon, Félicien Marceau, Marcel Aymé, Dominique de Roux, Jacques Perret, Antoine Blondin, Michel Mohrt, François Nourissier, tenus pour des rebelles ou des “libertins du siècle”. Il appelait cela “la droite buissonnière”, clin d’oeil à un opus blondinien, expression qu’il préférait à celle de “hussards des Lettres”, car il y incluait également Roger Vailland et Françoise Sagan, Marcel Moreau et Jean-Claude Pirotte, pour ne citer qu’eux. A plusieurs, il consacra des livres qui réussissaient à être admiratifs sans verser dans l’hagiographie ; il est vrai que le fardeau idéologique de ces héritages littéraires était parfois lourd à porter, même si Jacques Laurent insistait toujours pour rappeler que des journaux comme La Parisienne et Arts réussissaient à être littérairement engagés sans l’être politiquement. Vandromme fut en effet parmi les premiers (avec Jean Paulhan et Etiemble) à sortir Lucien Rebatet du purgatoire pour ses Deux étendards, à en faire de même avec Céline dès 1963, et avec Drieu La Rochelle et Brasillach, à évoquer Simenon comme “un romancier russe de langue française“, à se faire la propagandiste du génie de Cingria, et le premier à consacrer un essai (pénétrant) au Monde de Tintin.

Son patriotisme littéraire lui faisait porter Modiano au pinacle et descendre Yourcenar. De tous, il se voulut l’inlassable intercesseur dans ses milliers d’articles à la pointe aiguë publiés notamment dans les feuilles wallonnes Le Rappel, L’Echo du centre, le Journal de Mons. Leur mosaïque reflète le portrait d’un esprit indépendant, frondeur jusqu’à la provocation, maurrassien critique qui ne reniait rien de ses idéaux de jeunesse, non-conformiste plutôt qu’anticonformiste, indépendant jusqu’à l’isolement, pas vraiment ennemi de la formule virtuose au risque du calembour. Lui qui était né à Charleroi et qui passa sa vie à Loverval, il se définissait comme Belge de passage, provincial de Paris, français à titre étranger, citoyen de la littérature française. Un irrégulier, au fond, nostalgique d’une France giralducienne légèrement ivre d’une certaine douceur de vivre. Surtout fidèle aux valeurs qui cimentaient les écrivains de sa famille d’esprit. Moins politiques que morales. Un certain sens de l’honneur. L’esprit porté au compagnonnage. La fidélité en toutes choses, et avant tout en amitié. Lisez Un singe en hiver et vous verrez, Blondin le montre très bien. Pour la mélancolie, voyez Monsieur Jadis du même. Pol Vandromme était si délicieusement démodé dans ses critiques, qu’on l’eût volontiers gratifié du titre de “Monsieur Jadis de la critique”. Un vrai tempérament d’humeuriste. Du caractère dans l’écriture. Un bretteur toujours prêt à en découdre mais dans la tenue et sans jamais s’abaisser. Un chahuteur qui avait le goût de l’escouade. Grand lecteur identifiant un écrivain à l’oreille, au timbre de sa voix tel qu’il s’échappe de son livre. Tout cela en fait-il un critique de droite ? Celui-là fut en tout cas le Commynes de la droite buissonnière.

Son Céline, dont il louait le “génie sauvage”, était avant tout celui de Nord, qu’il tenait pour son chef d’oeuvre, contrairement à Entretiens avec le professeur Y et D’un château l’autre, assez critiqués, pour ne rien dire des pamphlets (”Il y a du fol chez Céline, avec les phobies d’un Français moyen de l’espèce la plus stupide et la plus hargneuse”). Nul doute qu’il aurait trouvé dans la rentrée littéraire 2009 de quoi “faire hennir les constellations”, pour reprendre l’une de ses expressions favorites. C’était un critique de tempérament, qui avait inconsciemment épousé, jusqu’au pastiche parfois, le verbe de ces écrivains dont il se fit le héraut dans toutes les feuilles belges et françaises qui sollicitèrent sa prose. Alors oui, un critique de droite, certainement qui pratiquait le désespoir avec allégresse, le courage avec désinvolture, et se réfugiait dans une vision romantique de l’Histoire pour mieux la sacrifier à la littérature, encore et encore, en l’envisageant avec le panache du capitaine de Boïeldieu enfilant ses gants blancs.

Pierre ASSOULINE

Photos : Pol Vandromme, “Antoine Blondin à Bercy”.

vendredi 4 septembre 2009

Barbaque et Bibine !

"pour leur bien ! tout pour leur bien ! peut-être manger un peu moins de viande !… pour leur digestion ! vous verrez la haine !… vous avez effleuré les Dieux !… Barbaque et Bibine ! pas une passion politique qui se puisse comparer !… dévotion, ferveur !… athée du bistek ! hostile à wisky ? rayé des vivants !"

Louis-Ferdinand Céline, D'un château l'autre, 1957.

mercredi 2 septembre 2009

Vient de paraître : Le Bulletin célinien Janvier 1985-Octobre 1985

De janvier à octobre 1985, Le Bulletin célinien délaissa le format in-12° pour adopter le in-4°. Cette initiative ne dura même pas un an puisque dès novembre 1985, le BC revint au format initial pour ne plus l’abandonner. Ces dix numéros, comme quasi tous ceux des années 80, étaient épuisés depuis longtemps. Ils font aujourd’hui l’objet d’une réédition anastatique sous la forme d’une élégante plaquette. En annexe, on trouvera les programmes de toutes les réunions organisées par Le Bulletin célinien de 1989 à 2009.

Au sommaire :
Souscription pour une plaque à la mémoire de L.-F. Céline à Montmartre
Entretien avec Germaine Constans
« Ferdinand et la Sirène du Point du jour
»
Un universitaire va sortir de l’ombre des lettres inédites de Céline à l’occasion d’une thèse de doctorat d’État
Plaque Céline : autorisation retirée !
L’anarchisme de droite
Allocution de Céline au siège du Groupement sanitaire français (20 décembre 1942)
« Au régal des vermines » par Marc-Édouard Nabe
« Lecteurs amis, moins amis, ennemis, critiques !... »
Deux lettres inédites à Henri-Albert Mahé
« Ne laissez pas vos femmes accoucher dans les maternités ! On les assassine !! » (Docteur Semmelweis), une pièce de Jean Fondone
Quand le fantôme de Céline met la Préfecture de Paris en émoi
Une lettre de Céline à René Towarth
« Céline écrit à Paraz qu’il aime bien les juifs et ne déteste pas les communistes » (Le Phare dimanche, 10 octobre 1948)
Le vieux froussard et le jeune insolent (correspondance Chardonne / Nimier)
« Le Phare dimanche » et l’affaire Céline (1948-1949)
Un monument célinien ! (Bibliographie des écrits de L.-F. Céline, 1918-1984)
« Lettres à Tixier ; Céline : scandale pour une autre fois » –
« L’Affaire Céline. Une nouvelle mort à crédit » (Le Phare dimanche, 5 mars 1950)
Informations en bref
Programmes des réunions organisées par Le Bulletin célinien, 1989-2009.


Un ouvrage broché, 21 x 30 cm, couverture illustrée, 74 pages, 15 € franco.

Commande auprès du Bulletin célinien :
Bulletin célinien
B. P. 70
B 1000 Bruxelles 22


Chèque à l’ordre de M. Laudelout.

mardi 1 septembre 2009

A paraître : Lettres de Louis-Ferdinand Céline à Joseph Garcin

Les Editions Ecriture annoncent pour le mois d'octobre la réédition des lettres de Louis-Ferdinand Céline à Joseph Garcin.

Présentation de l'éditeur
L’homme qui inspira le « Voyage » : Céline rencontre Joseph Garcin avant la rédaction de Voyage au bout de la nuit (1932). Celui-ci lui fournit des informations sur la pègre qu’il fréquente et alimente ainsi la mythomanie de Céline, que son personnage d’affranchi fascine. De septembre 1929 à octobre 1938, Céline a adressé à Joseph Garcin vingt-huit lettres qui constituent un apport précieux sur la genèse de l’oeuvre célinienne et de sa création romanesque. Cette correspondance permet d’approcher l’alchimie du travail d’écriture et la genèse tant de l’écrivain lui-même que de son oeuvre majeure.

www.editionsecriture.com